Sunday 29 June 2008

BOOK I, 'Society Saved' 11

I
I know they will speak wicked lies without number
To wash their hands clean from Truth, staining and somber,
They’ll swear it’s not so, ‘wasn’t my fault—was his one’
But Aeschylus, Dante, you prophets all know it:
........The wicked never escape a poet,
Never, whether collared or grabbed by the wrist. And
The ledger of Mercy is closed to ... complicity;
........I have put bars on history.
........Today, History is a prison.

Time’s gone when a poet could just pray, be a dreamer: he
Now holds all keys to the Conciergerie.
Should you-know hold Court, hang our necks with his chains
We'll keep Pocket Princeling in view (like a joker)
........And the Emperors at his shoulder—
Macbeth is a swindler; Caesar only feigns.
You’re guarding these prisoners, my winged strophés!
........The stars are Calliope’s
........They log the convicts’ names

II
O people in tears! Though you cry for revenge, all
These frigid old rhetors say Verse is an Angel
It should ignore Fould-Magnan-Morny-Maupas, flies
Instead joying up to watch night’s calm fulfilled …—
........No! then we’d share the guilt
For crimes on the march, whose step I synchronise,
Since you’d veil men’s view of these wickedest ones,
........Azure skies, stars, suns,
........Shan’t occupy my eyes!

Since a beggar can silence your speeches’ true worth,
Since liberty tumbles and sprawls on the earth
Falls like a girl’s corpse, a woman new-drowned,
Since prison-ships echo with dying men’s cries
........I will have tomb-clear eyes
For those heads a bandit’s compelled to bow down
I will sing: rise, my people! O Heavens, roar, fight,
........France, in the depths of night
........See my flaming brand!

III
These crooks that would try to turn France into China
They’ll soon hear my lash cracking down on their spine. A
Te Deum they’re singing? I will cry Memento!
I’ll scourge all the men, the deeds, the names and titles
........Those with swords, those mitres
My verse is a vice, and in that they’ll be pent, all.
We will see them fall: surplice, prayer-books, epaulettes,
........And Caesar, under my stirrups
........Saving himself, rolling up his mantle.

And fields, meadows, plains, and the flowers and lakes
The clouds floating by that resemble wool-flakes
The sea that sets bladderwrack and seaweed streaming
The Ocean, enormous, like a green-scaly hydra,
........The forest with Rumour inside her.
The lighthouse on waters, the mountain star's gleaming,
Recall me to me: tell me, quietly, with passion:
........A vengeful spirit is passing
........Driving before it demons!


I
Oh! je sais qu'ils feront des mensonges sans nombre
Pour s'évader des mains de la Vérité sombre,
Qu'ils nieront, qu'ils diront: ce n'est pas moi, c'est lui.
Mais, n'est-il pas vrai, Dante, Eschyle, et vous, prophètes?
Jamais, du poignet des poëtes,
........Jamais, pris en collet, les malfaiteurs n'ont fui.
J'ai fermé sur ceux-ci mon livre expiatoire;
........J'ai mis des verrous à l'histoire;
........L'histoire est un bagne aujourd'hui.

Le poëte n'est plus l'esprit qui rêve et prie;
Il a la grosse clef de la conciergerie.
Quand ils entrent au greffe, où pend leur chaîne au clou,
On regarde le prince aux poches, comme un drôle,
........Et les empereurs à l'épaule;
Macbeth est un escroc, César est un filou.
Vous gardes des forçats, ô mes strophes ailées!
........Les Calliopes étoilées
........Tiennent des registres d'écrou.

II
Ô peuples douloureux, il faut bien qu'on vous venge !
Les rhéteurs froids m'ont dit : Le poëte, c'est l'ange,
Il plane, ignorant Fould, Magnan, Morny, Maupas ;
Il contemple la nuit sereine avec délices...—
........Non, tant que vous serez complices
De ces crimes hideux que je suis pas à pas,
Tant que vous couvrirez ces brigands de vos voiles,
........Cieux azurés, soleils, étoiles,
........Je ne vous regarderai pas!

Tant qu'un gueux forcera les bouches à se taire,
Tant que la liberté sera couchée à terre
Comme une femme morte et qu'on vient de noyer,
Tant que dans les pontons on entendra des râles,
........J'aurai des clartés sépulcrales
Pour tous ces fronts abjects qu'un bandit fait ployer ;
Je crierai : Lève-toi, peuple! ciel, tonne et gronde!
........La France, dans sa nuit profonde,
........Verra ma torche flamboyer!

III
Ces coquins vils qui font de la France une Chine,
On entendra mon fouet claquer sur leur échine.
Ils chantent :
Te Deum, je crierai: Memento!
Je fouaillerai les gens, les faits, les noms, les titres,
........Porte-sabres et porte-mitres;
Je les tiens dans mon vers comme dans un étau.
On verra choir surplis, épaulettes, bréviaires,
........Et César, sous mes étrivières,
........Se sauver, troussant son manteau!

Et les champs, et les prés, le lac, la fleur, la plaine,
Les nuages, pareils à des flocons de laine,
L'eau qui fait frissonner l'algue et les goëmons,
Et l'énorme océan, hydre aux écailles vertes,
........Les forêts de rumeurs couvertes,
Le phare sur les flots, l'étoile sur les monts,
Me reconnaîtront bien et diront à voix basse
........C'est un esprit vengeur qui passe,
........Chassant devant lui les démons!


Jersey. 13 novembre 1852

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